Photographie: Christian Regnier (à gauche sur la photo, à côté de Roger Barralis) au CA de l’AAUNEF du 29 octobre 2013 présidé par Paul Bouchet, en présence de Tom Madden de passage à Paris. Photo Robi Morder.
Notre ami Christian Regnier est décédé le 23 juin. Né le 28 juin 1937, il fut président de l’AGE des EPICES de France (Prépas Commerce et Gestion), en 1959, président de la FEP de 1960 à 1962. Administrateur du CROUS de Paris, en tant qu’étudiant puis de personnalité extérieure choisie pour les anciens de 1957 à 1971 il fut aussi VP puis SG du Paris Université Club, de 1959 à 1985. Professeur d’université, puis retraité, il fut durant une longue période membre de notre conseil d’administration. Hispaniste – il était un traducteur de Sepulveda – il était également un grand promoteur de la vie culturelle à Bergerac, où il avait présidé l’association des amis de Cyrano de Bergerac. Nous reviendrons plus longuement sur la disparition de notre ami, si présent et discret à la fois, toujours respectueux et à l’écoute des autres comme savent l’être ceux du pays de Montaigne.
R.M.
Nous publions ci-dessous le texte de Christian Regnier pour notre colloque logement du 7 novembre 2015.
LES MAISONS COMMUNAUTAIRES
« Je vais aborder une expérience vécue, un avatar du logement étudiant des années 50/60 « Les maisons communautaires ». Rappelons que les femmes venaient tout juste d’obtenir le droit de vote avec la pleine citoyenneté, répondant au programme de la Résistance.
Pour ma part, élu président de la Fédération des étudiants de Paris et siégeant au COPAR (Comité parisien des œuvres universitaires, ancêtre des CROUS, participé à l’application de la loi sur les œuvres de 1955 et siégé jusqu’en 1971. Le COPAR était régi par la loi de 1901, organisme de droit privé, sans but lucratif. Il était compétent en matière culturelle, sociale, de logement, de restaurants universitaires, etc.
Dans la foulée de la loi de décembre 1945 portant disparition des « maisons closes » et suppression des fiches de la « police des mœurs » et après leur« réquisition » , les bâtiments des maisons communautaires furent mis à disposition du ministère de l’Education nationale qui en transfera la gestion au COPAR qui en assurait la mise en service par le truchement du service logement des œuvres , dirigé alors par Mr Maisonneuve. Chacune des maisons (une bonne vingtaine) disposait d’un responsable élu ( ?) par les locataires. Aprés la loi de 1955 le CNOUS et celui de Paris ne goutèrent plus cette étrange charge.
J’ai encore en mémoire les débats ardus avec le Contrôleur financier du Ministère de l’éducation nationale lord de l’établissement du »bleu du budget » quand on arrivait au chapitre de « maisons communautaires ». La chaine de tutelle et de subventions était compliquée, les relations avec les responsables de maison et le comité difficiles. De fait les responsables de maison avaient parfois entrepris un régime de sous location illicite, les locaux étaient vétustes et, en plus , inadaptés, la collecte des loyers très difficile, les relations avec les anciens propriétaires souvent désagréables, d’autant plus que certains d’entre eux occupaient encore une partie des lieux.
Il m’est arrivé d’en entendre une, il me semble que c’était rue des quatre vents, sur fond de miroirs aux murs et plafond dire « c’était mieux tenu avant ».
Je décidai donc en 1960 ou 1961 je cois d’abandonner ce système pour ne pas devenir « complice ou esclave » ! Et ce fût la deuxième fermeture des maisons closes
Mais je décidai de poursuivre l’objectif logement sous une autre forme en créant à Montrouge, rue Gambetta, à deux pas de la porte d’Orléans un Foyer étudiant réservé aux étudiants mariés et, parfois parents d’un enfant ce qui était avec Jean Zay à Antony la seule disponibilité pour eux. Un immeuble fût construit comprenant une vingtaine de deux pièces, avec cuisine commune pour deux appartements et locaux communs au rez de chaussée .Elle fût gérée par le Recteur de l’Université de Paris et le député de la Dordogne Henri Sicard. La subvention du Crous fut maintenue , les problèmes d’éthique ayant disparu.
J’ai lu dans un article récent , il me semble sous la signature de Konopniki que « la libération sexuelle étudiante de 1968 aurait été le « point final « des « maisons closes !!!
Aussi je ne résiste pas à l’envie de narrer une anecdote « vécue » à Nanterre. Je dis vécue car le hasard a voulu qu’en 1968 je sois étudiant à Nanterre où je préparais un certificat de Latin ( horresco referens) qui me manquait et j’avais aussi à connaitre des problèmes de Nanterre es qualité d’administrateur du CROUS de Paris (jusqu’en 1971).
En effet pour mettre un terme au « désordre des mœurs » des deux résidences étudiantes- garçons et filles séparés- le ministre de l’Education nationale –Alain Peyrefitte- avait décidé d’annuler la décision du conseil d’administration du CROUS, validée par le Recteur, de les laisser en libre accès. Il imposa alors unilatéralement un règlement strict de »couvre feu » et commanda de grandes grilles en fer pour fermer l’accès aux pavillons la nuit. Ces grilles furent rapidement livrées sur place et disparurent…la nuit suivante. Notons que Mr Peyrefitte justifia sa décision en se référant au Code de la Famille …datant de Napoléon